Réparer le vivant ?

Marie Sorbier : Comment avez-vous construit cette nouvelle saison ? Est-ce qu’elle a une tonalité ou une couleur particulière ?
Laurent Dréano : C’est la saison du renouveau et peut-être aussi du besoin de réparation, à travers l’un de ses fils rouges qui traite du rapport entre l’intime et le collectif. Depuis la fin de la pandémie, les artistes ont travaillé, le public est de retour ; vient le moment d’attiser sa curiosité pour découvrir de nouvelles créations. Il y aura d’étonnants chocs esthétiques. Les artistes nous parlent du désir et de l’urgence qu’ils ressentent pour décrire un monde qui est en mutation, de leurs intuitions par rapport à l’âpreté de ces bouleversements, mais aussi de la façon de le raccommoder. Certain.es abordent le thème de l’enfance et de l’adolescence, une génération malmenée, mais qui se prend en main. Le théâtre nous aide-t-il à mieux appréhender le monde ? Cette question touche d’abord la jeunesse, plus poreuse et lucide de ce devenir incertain.

M.S. : Les artistes traitent en effets de sujets graves, de sujets de société, mais il y a une forme de légèreté dans cette programmation 23/24
L.D. : La Maison de la Culture est un lieu où l’on vient par plaisir et par envie, dans la joie de partager une expérience et un moment de découverte. La programmation musicale, les grandes formes théâtrales, la danse ou le cirque, les expositions, le cinéma sont autant d’invitations à se sentir transporté, interrogatif ou heureux, mais toujours vivant parce que partie prenante. Nous réalisons que nous sommes autant un lieu de création qu’une fabrique du vivant, faite d’émotions, d’interactions et… je l’espère, de sourires.

M.S. : Justement, quand on embrasse du regard la saison 23 / 24 on est frappé par son éclectisme, aussi bien dans les genres, les formes que dans les sujets abordés. Comment parvient-on à créer du sens avec cette diversité ?
L.D. : La diversité est inscrite dès le projet initial d’André Malraux. Toutes les disciplines sont présentes à la Maison, y compris les arts visuels et le cinéma. Les artistes doivent s’en saisir. Beaucoup revisitent le répertoire au travers de leur regard d’aujourd’hui pour lui rendre toute son actualité : David Bobée, le Dom Juan de Molière ; Maelle Dequiedt, le Stabat Mater de Scarlatti ; Aurore Fattier, l’Hedda Gabler d’Ibsen ; Tiphaine Raffier avec son adaptation du Nemesis de Philippe Roth ; Marie Fortuit qui porte la parole d’Elfriede Jelinek, prix Nobel de littérature ; ou l’adaptation magistrale d’On Achève bien les Chevaux d’Horace McCoy par Clément Hervieu-Léger, Daniel San Pedro et le Ballet de l’Opéra national du Rhin dirigé par Bruno Bouché. C’est une ligne de cette saison, que cette incursion dans les livres, dans les pièces et romans de grands auteurs.

M.S. : Outre l’accueil du public, il y a aussi l’accueil des artistes. À demeure, car il y a des artistes associé.es et des artistes compagnon.nes. Comment envisagez-vous leur présence dans les murs et au-delà ?
L.D. : Une maison vivante est une maison d’artistes. D’abord dans une grande complicité avec les plus présent.es : associé.es au projet d’origine ou qui reviennent régulièrement comme des oiseaux migrateurs et qui sont en effet nos compagnons, ou compagnonnes. Au fur et à mesure, nous construisons des liens avec de nouvelles compagnies. Ils débouchent sur des résidences, du temps pour expérimenter. La complicité c’est celle par exemple que nous avons avec Cédric Orain, qui prépare son nouvel opus sur la performance sportive. Les projets grandissent et changent de format : Noëmie Ksicova nous avait bouleversée avec Loss qui a connu un grand succès et lui a ouvert des théâtres parisiens, elle revient avec Enfant Brulé que nous présenterons sur le grand plateau de la Maison. Au-delà du symbole il s’agit de donner plus de place et de moyens aux femmes metteuses en scène afin qu’elles puissent toucher un public plus large. Cette année, Tiphaine Raffier et Aurore Fattier jouent dans la grande salle. Et bien sûr, Zabou Breitman qui adapte Zazie dans le métro de Raymond Queneau, en comédie musicale sur une musique de Reinhardt Wagner. Cela faisait plusieurs années que nous en parlions et nous réalisons le caractère précurseur de ce texte qui, sous des dehors pleins d’humour et de légèreté, parle aussi de l’enfance malmenée.

M.S. : Alors que d’autres Scènes nationales ont choisi de changer de nom, la Maison de la Culture d’Amiens a gardé le sien. Qu’est-ce qu’il veut-dire pour vous ?
L.D. : La Maison de la Culture d’Amiens est une institution, au sens noble du terme. Elle a une notoriété nationale et internationale grâce à tous les directeurs qui m’ont précédé. C’est donc un nom reconnu qui porte à la fois l’ambition de Malraux et cette notion d’habitat partagé — avec les artistes et les habitant.es du territoire. À l’automne nous fêterons les 30 ans de sa rénovation (1993) et en 2026, le 60e anniversaire de son inauguration. De ce nom découle l’idée d’hospitalité qui, de Côté Jardin jusqu’au New Dream, nous incite à en faire un lieu toujours plus accessible et ouvert à toutes et tous. Les mots ont du sens, pour l’équipe comme pour les artistes, et pour le public. Nous avons inscrit sur le fronton de la Maison « Ici chez vous », mais nous pourrions inscrire aussi « Ici c’est vous », car nous voulons travailler davantage « avec » que « pour » et même « Ici, et chez vous » puisque nous sortons aussi de nos murs.
Retenons de cela que la Maison est un lieu de respiration (d’inspiration aussi) et donc de vie. On a pris conscience relativement récemment que si la vie n’a pas de raison de s’arrêter, le vivant, lui, est devenu très fragile. Les artistes nous invitent à interpréter ce vivant, souvent en changeant de point de vue, à en être une composante, à reconnaître que nous — vivants humains et non humains — sommes des êtres sensibles, constitutifs de cette fragilité, par nos interdépendances. Face à de nouvelles anxiétés, si chacun.e peut puiser dans ses propres ressources, matérielles ou spirituelles, tout le monde a besoin de trouver du sens collectif, et l’art y contribue. Le spectacle est vivant, le cinéma est au présent et les arts visuels ne parlent que de cela. En témoignent les expositions des étudiant.es qui investissent les champs de l’anthropologie pour chercher à comprendre comment se situer dans le monde de demain.

M.S. : Vous évoquiez 2026 ; est-ce que la Maison commence à se préparer pour cet anniversaire ?
L.D. : Préparer un anniversaire c’est autant assumer ce qui nous a constitué que se projeter dans l’avenir, se dire que la génération qui aura 20 ans en 2026 connaitra aussi 2066. Est-ce que ces jeunes seront encore là dans 40 ans ? Quand je suis arrivé, j’ai rencontré des habitués de la maison qui me disaient avoir assisté au discours de Malraux, en culottes courtes, et qui sont toujours fidèles à la Maison, curieux de tout. Nous avons un lien fort à ce public que je veux saluer. Pas de nostalgie donc, mais le besoin de dresser des perspectives. Pourquoi un lieu comme celui-ci s’est imposé, et comment faire en sorte que cette ressource pour les habitant.es reste opérante ? Célébrer les 60 ans de la Maison c’est revalider sa nécessité et sa relation forte à un territoire. C’est la constance d’une politique nationale (à laquelle je veux toujours croire), qui croise une volonté régionale et qui s’inscrit dans l’ambition de la métropole amiénoise de porter la culture comme un moteur de développement.

M.S. : Cette exigence territoriale semble au coeur de votre projet, mais n’est-ce pas d’abord celle des partenariats ?
L.D. : Nous sommes une Scène nationale, maison de production et de diffusion, dont l’ADN est dans le travail collaboratif avec l’ensemble de la sphère culturelle, dans l’envie de s’associer à des projets fédérateurs pour le territoire, dans la dynamique d’un service public de l’art et de la culture. Cette coopération est d’abord accompagnée par nos partenaires publics dont il faut saluer l’engagement constant à nos côtés, l’État, Amiens Métropole et la Région Hauts-de-France. Ce sont aussi de nombreuses collectivités territoriales et des services à la population avec qui nous montons des projets, à Amiens et de façon décentralisée dans le département et la région. C’est l’Union européenne (UE) à travers nos réseaux internationaux. La coopération nous la voulons également avec le monde de l’entreprise et je veux remercier particulièrement à ce titre notre club des mécènes.
Cette dimension partenariale, chez nous et hors les murs, est constamment à l’œuvre dans le travail, si essentiel, de médiation, mené avec les enseignant.es, l’école, le collège, le lycée jusqu’à l’université. Elle l’est dans les projets montés avec les associations dans le champ social. Elle l’est avec les médias. Elle l’est dans notre rapport aux filières culturelles. Dans cette saison où le livre est particulièrement à l’honneur dans la programmation des spectacles et des expositions, je pense à des synergies avec les bibliothèques, avec les éditeurs et avec les libraires d’Amiens à l’instar de nos projets avec la librairie Martelle ; sans oublier la BnF !
Amiens a travaillé sur l’ambition de devenir une capitale européenne de la Culture, et doit en garder la stimulation, basée sur les atouts de coopérations territoriales qui ne demandent qu’à se renforcer. Nous nous sommes questionnés sur la manière de mieux intégrer les enjeux du vivant que révèle la vallée de la Somme, aussi riche de son histoire que de sa biodiversité. Voici justement l’occasion de croiser des notions qu’on a sans doute tenues trop éloignées, mais qui ont tout à gagner à se féconder. Nature, culture, ce que nous infligeons au vivant, ce que le vivant nous apprend, autant d’inspirations pour la création artistique que pour réparer ces liens.

M.S. : Pour entrer dans cette programmation, vous proposez une fête et quelques beaux concerts à l’automne.
L.D. : La fête d’ouverture de la saison est un rendez-vous que la jeunesse amiénoise apprécie désormais de retrouver chaque année et c’est satisfaisant de constater qu’elle identifie bien la Maison. Ensuite, nous sommes heureux de retrouver Juliette qui avec son talent de chanteuse à texte et de chanteuse populaire nous ravira de son humour. Et puis Albin de la Simone, il est ici chez lui.

M.S. : Un autre grand événement musical est la venue de l’Orchestre national de France qui proposera Un Américain à Paris.
L.D. : Enfin ! Car nous voulions accueillir « le National » depuis plusieurs années. Le programme Gershwin est magistral, avec le concours de l’immense pianiste Lise de la Salle. On retrouvera d’autres très grands artistes, plus tard en saison, comme Benjamin Grosvenor, Andy Emler ou Anne Paceo.

M.S. : Concernant l’Orchestre de Picardie, qu’allons-nous pouvoir découvrir de leur travail ?
L.D. : L’Orchestre de Picardie est comme en résidence à la Maison de la Culture et c’est une chance que de compter sur sa présence à l’année. L’Orchestre s’appuie sur des mélomanes amiénois très fidèles et cherche à s’ouvrir à de nouveaux publics. Au-delà des concerts du soir, les Pauses musicales du midi ont rencontré un vif succès.

M.S. : Il y a une autre particularité de la musique à la Maison de la Culture d’Amiens c’est Label Bleu.
L.D. : Il faut rendre hommage à Michel Orier d’avoir conçu ce label discographique, il y a presque 40 ans qui reste un cas unique. Le studio d’enregistrement fonctionne et, sans fausse modestie, c’est le plus beau au nord de Paris. On signe, cette année, avec Madeleine Cazenave et son trio Rouge. Et puis il y a les concerts, à Amiens et ailleurs. Jî Drû revient avec son deuxième opus, Fantômes.

M.S. : Dans le cahier des charges d’une Scène nationale, il y a cette exigence de pluridisciplinarité. Vous vous devez de mettre en avant différents arts et vous proposez aussi des expositions, comme celle de Chloé Cruchaudet.
L .D. : Les arts visuels contribuent à cette ouverture et offrent une autre façon d’accéder à la Maison que le spectacle et ses rituels. C’est à ce titre que nous voulons en améliorer l’accessibilité, aux personnes en situation de handicap, mais aussi à des publics plus éloignés. Ce renforcement des arts visuels est en cohérence avec les intentions d’Amiens Métropole de donner à l’image une place plus importante dans les prochaines années. Les expositions se construisent presque systématiquement en coopération avec nos partenaires qui travaillent dans ces mêmes logiques. Les Rendez-Vous de la Bande Dessinée font d’Amiens la deuxième ville du 9e art après Angoulême. La Maison de la Culture y contribue avec ses spécificités et sa pluridisciplinarité. Chloé Cruchaudet, scénariste, dessinatrice et coloriste, crée des univers multiples et passionnants qui se racontent avec beaucoup de sensibilité. L’exposition ouvre avec le Festival en juin et se poursuit jusqu’à fin septembre. Avec le Frac Picardie nous accueillons l’artiste Dominique De Beir en Annexes et digressions de l’exposition qui se tient à Saint-Riquier. Le livre d’artiste, célébré à partir des oeuvres de Jean-Marc Brunet, nous invite à la réflexion sur l’art et la littérature, mais aussi sur l’édition et la microédition qui intéresse également le Frac. Notre participation aux Photaumnales de Diaphane, s’inscrit dans une thématique autour du sport à partir des terrains de foot, photographiés par le Hollandais Hans Van der Meer. Elle donne prétexte à croiser les formes avec le contrepoint d’artistes et élèves de l’ESAD sur le football que nous présentons dans le cadre d’IC.ON.IC. Cette thématique du sport et de l’accessibilité parcourt cette saison (et l’on peut comprendre pourquoi). Enfin dans un programme intitulé CURA, initié par le ministère de la Culture, nous allons associer un collectif de curateurs. La Maison joue son rôle dès lors qu’elle est un point de rendez-vous et de fertilisations réciproques. Les artistes et générations s’y croisent. Depuis trois ans les étudiant.es jouent cette carte en invitant des anthropologues à venir débattre lors des expositions dont iels assurent le commissariat.

M.S. : La Maison de la Culture d’Amiens a la chance d’avoir un cinéma. Est-ce important dans un lieu dédié au spectacle vivant ?
L.D. : C’est essentiel. Le grand public, qui assiste le soir à un spectacle, ne se rend pas forcément compte que des classes sont venues dès neuf heures le matin assister à une séance au cinéma Orson Welles. L’école du cinéma commence dès la maternelle. Là aussi nous avons un partenariat formidable avec l’Acap qui permet de donner le goût du cinéma aux plus jeunes. Nous travaillons en entente de programmation avec le Ciné St-Leu. Nous imaginons toutes les passerelles possibles entre les arts, comme, cet automne, les projections associées à la Triennale Art et Industrie du Frac Grand Large de Dunkerque, Chaleur humaine. Enfin et bien sûr, le Festival International du Film d’Amiens (FIFAM) qui est dans nos murs depuis plus de quarante ans. L’arrivée de Marie-France Aubert, la nouvelle directrice du festival, a été l’occasion de relancer de nouvelles coopérations.

M.S. : Plusieurs festivals émaillent en effet la saison. Comment pensez-vous leur équilibre dans la programmation ?
L.D. : Chaque trimestre a son temps fort. Le festival Amiens Europe, qui s’est construit autour de la création européenne, s’est ouvert depuis deux ans à des thématiques portées par les valeurs de l’UE : lutte contre les discriminations, égalité femmes-hommes, enjeux environnementaux… Dans le cadre de notre réseau de coopération (APAP), nous les avons regroupées sous la bannière Feminist Futures. Cette approche féministe au sens large, revendiquée par nombre d’artistes, prend un sens supplémentaire quand elle permet d’échanger et de confronter des points de vue culturels et des manières différentes d’aborder ces sujets dans un cadre européen. Elle correspond aussi à un mouvement générationnel qui intéresse beaucoup de collectifs locaux.

M.S. : Un autre temps fort, consacré aux voix du monde, s’attache à élargir notre champ de vision et de conscience. Quels sont les artistes qui vont venir cette année à Amiens Tout-monde, dont le nom emprunte une expression d’Édouard Glissant ?
L.D. : Nous avons pris Édouard Glissant en référence, car il défend une vision d’un monde en archipels dans lequel la richesse nait des relations interculturelles et du métissage. Nous sommes attachés à accueillir des artistes dont le geste poétique et musical croise cette volonté d’émancipation qui est par nature politique. Je peux déjà annoncer Zia Soares, Vincent Fontano, les danseuses et danseurs de la Compagnie sud-africaine Via Katlehong ou le retour de Rabi Abou-Khalil, grand maître du Oud. Nous compléterons ce programme dans le courant de l’année.

M.S. : Au chapitre théâtre, vous donnez, comme toujours, une belle place à l’émergence, mais vous présentez aussi de très grandes formes.
L.D. : C’est dans la mission de la Maison de la Culture que de présenter ces créations d’aujourd’hui qui, en l’occurrence, n’ont pas choisi de faire petit ! Nous avons parlé des femmes au plateau. Après Dom Juan, les publics de la Maison vont découvrir Philippe Quesne, sa rêverie et son univers décalé qui à partir du Jardin des Délices, interroge l’avenir de la planète. Nous présenterons Extinction de Julien Gosselin, à Valenciennes. Quant au Peplum Médiéval d’Olivier Martin-Salvan, ce sera un joyeux moment d’exploration du Moyen Âge, facétieuse, mais historiquement documentée. Et au mois de janvier, un autre événement, la première incursion au théâtre du cinéaste Nanni Moretti qui monte des textes de Natalia Ginzburg.

M.S. : Côté grand format, la danse n’est pas en reste avec les chorégraphes Olivier Dubois, le Tanztheater de Wuppertal et bien d’autres.
L.D. : Là aussi, des chocs esthétiques. Olivier Dubois remonte Tragédie. Nous accueillerons pour la première fois le Tanztheater de Wuppertal avec Café Müller, ballet mythique de Pina Bausch, précédée de deux pièces de Boris Charmatz avant de retrouver (La)Horde et le Ballet national de Marseille pour The Age of Content. Citons aussi Kader Attou en début de saison. Enfin, on sera aux confins de la danse et du théâtre avec la vision passionnée d’On achève bien les chevaux.

M.S. : Et, sans épuiser le sujet, d’autres formes artistiques ?
L.D. : La Magic Night de Thierry Collet, ou de la marionnette qui s’affronte à la tragédie grecque dans L’Oiseau de Prométhée et bien sûr du cirque comme on l’aime, avec les très beaux spectacles de deux compagnies internationalement renommées, Circus Baobab et Cirque Éloize. Et pour finir sur une note lyrique, la Traviata, montée par Opéra Clandestin et un choeur amateur d’Amiens.

Propos de Laurent Dréano, directeur,
recueillis par Marie Sorbier, journaliste | Mai 2023.